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1 - Situation militaire au début du mois d'août 1918 :


Le 3 mars 1918, le traité de Brest-Litovsk est signé notamment entre l'Allemagne,l'Autriche-Hongrie et la Russie bolchévique. Ce traité mettant fin aux combats sur le front de l'est, permet aux Allemands de transférer des centaines de milliers de soldats et de l'armement sur le front de l'ouest. Le général Ludendorff – adjoint au chef d'état-major de l'armée allemande en campagne – identifie comme objectif le point le plus faible du dispositif allié, à savoir la 5e Armée britannique. « Nous devons battre les Anglais » (conférence à Mons, le 11 novembre 1917). Et il faut attaquer avant que les Américains arrivent en nombre en France. Les Britanniques tiennent la partie du front comprise entre Ypres et l'Oise ; la 5e Armée étant stationnée dans l'Aisne. Mettant à profit leur avantage quantitatif, les Allemands lancent donc le 21 mars 1918, l'opération Michael afin d'enfoncer les défenses alliées en direction de la Somme. L'offensive allemande sera finalement stoppée le 4 avril 1918 à Villers-Bretonneux par les troupes australiennes renforcées par tout ce qu'il avait pu être trouvé comme unités combattantes. Cet arrêt permet aux Alliés de conserver Amiens qui est à l'époque un nœud ferroviaire vital. Les Allemands vont ensuite lancer plusieurs opérations pour tenter de casser la défense alliée, en vain. Mi-juillet, les troupes allemandes sont épuisées et leur avantage issu de la fermeture du front de l'est a été consumé. C'est à ce moment-là que Foch décide de lancer une contre-attaque massive visant à dégager complètement les voies ferrées autour d'Amiens et à résorber « le saillant d'Amiens ». L'opération est programmée pour le 8 août et sera connue plus tard sous le nom de « Bataille d'Amiens » ou« Troisième bataille de Picardie ». L'attaque sera menée conjointement par les forces britanniques, comprenant les troupes australiennes et canadiennes, et les forces françaises. La zone d'attaque s'étend entre Albert et Montdidier : IIIe corps britannique : entre Morlancourt et Sailly-Laurette ; Corps australien : entre Sailly-Laurette et Villers-Bretonneux ; Corps canadien : entre Villers-Bretonneux et Domart sur la Luce ; Ire armée française : entre Domart sur la Luce et Hargicourt, l'ensemble de l'opération repose sur la surprise. Il n'y aura donc pas de bombardement préparatoire à l'attaque ou de tirs de repérage. De plus, les Alliés doivent transférer dans la discrétion, le corps canadien stationné plus au nord dans le secteur de Lens-Vimy, soit près de 100 000 hommes avec leur matériel.

 

2 – Les préparatifs de la bataille

 

Au début du mois d'août 1918, le corps d'armée canadien, placé sous les ordres de Sir Arthur Currie, est composé de quatre divisions. Le front dévolu au Canadiens lors de l'attaque du 8 août, est divisé comme suit :2e Division canadienne : entre le sud de Villers-Bretonneux (voie ferrée Amiens-Tergnier) et le sud de Marcelcave (Bois de Morgemont) ;1re Division canadienne : jusqu'au nord de Hangard ;3e Division canadienne : jusqu'à Domart sur la Luce (la limite sud est grosso modo l'actuelle route départementale D934 reliant Amiens à Roye). La 4e division canadienne est gardée en réserve.Chaque division est composée de :trois brigades d'infanterie avec chacune quatre bataillons d'infanterie et une batterie de mortiers de tranchée ; de troupes divisionnaires ;de troupes à cheval ; de l'artillerie divisionnaire, de troupes du génie,de troupes sanitaires (3 unités d'ambulance de campagne). La 2e division canadienne va attaquer Marcelcave avec sa 4e brigade d'infanterie constituée des bataillons n°18 (Western Ontario Regiment), 19, 20 (Central Ontario Regiments) et 21 (Eastern Ontario Regiment). Les bataillons étaient recrutésdans des zones précises du Canada. En l’occurrence, ici, les quatre bataillons de la 4e brigade d'infanterie provenaient de la province de l'Ontario.Au début du mois d'août, ces unités sont stationnées au sud-ouest d'Amiens à Pissy (18th battalion), Briquemesnil (19th battalion), Bougainville (20th battalion)et Seux / Fluy (21st battalion). Pendant la journée du 1er août, elles se rendent à pieds jusqu'à un terrain au sud de Picquigny pour assister à un entraînement conjoint avec des unités blindées britanniques (Tank Corps) en vue des opérations futures. La démonstration porte principalement sur les moyens de communication entre l'infanterie et les équipages des chars : désignation d'objectifs par grenade fumigène, signalétique de drapeaux (drapeau blanc et vert pour signaler que l'objectif a été traité et que l'avancée peut reprendre : drapeau jaune et rouge pour signaler que le char est hors d'état d'action ; drapeau tricolore pour signaler que le char se retire après la fin des opérations). En absence de bombardement d'artillerie préparatoire, la présence de char en soutien des unités d'infanterie permettait d'augmenter la puissance de feu contre les postes de mitrailleuses ennemis et d'ouvrir un passage à l'infanterie dans les champs de barbelés. Les armées britanniques étaient équipées de char Mark V. Pouvant être conduit par un seul homme, disposant d'un blindé plus épais, ce char était néanmoins affecté par une ventilation du compartiment intérieur encore plus mauvaise que son prédécesseur, le char Mark IV. La 4e brigade d'infanterie canadienne allait être appuyée par le 14th Battalion du Tank Corps pendant les combats du 8 août.Le 3 août, les bataillons font mouvement vers la banlieue sud-est d'Amiens (St- Acheul, Boutillerie, Cagny). Puis le lendemain, ils rejoignent la zone du front à l'ouest de Villers-Bretonneux. Pour garder l'effet de surprise, l'ensemble des déplacements se font de nuit, tout feux éteints, il est interdit de fumer. Le jour venu tout mouvement est interdit et les hommes restent tapis à couvert afin de ne pas éveiller les soupçons de l'aviation allemande qui survole la zone. Le captain (Les grades canadiens ont été conservés dans le texte) R.J. Renison, aumônier du 21st Battalion décrit ces moments :(Traduction extraite du journal de marche du 21st Canadian Battalion, août 1918 (Bibliothèque & archives Canada)Les routes étaient encombrées avec les véhicules de transport et les troupes ; on pouvait entendre les salutations entre les unités de Vancouver, de Winnipeg, d'Ottawa, de Toronto, de Hamilton, de Montréal et de Halifax. Aux premières heures de la matinée, nous traversâmes la banlieue d'une cité déserte dont les tours vénérables de sa cathédrale scrutaient la surface de la terre tel l'esprit sentinelle d'une France maltraitée mais non soumise. À l'aube, la brigade pénétra dans un bois [Bois l'Abbé et le bois d'Aquesne, à l'ouest de Villers-Bretonneux] et dormit toute la journée.L'artillerie allemande bombarde régulièrement la zone. Le 21st Battalion en fait les frais dans la nuit du 5 au 6 août lorsqu'un obus frappe un petit dépôt de munitions tuant une vingtaine de soldats. La plupart seront enterrés au cimetière militaire britannique de Longueau.La matinée du mardi 7 août est très clémente permettant à l'aviation alliée d'être plus active que d'habitude. Les équipes de reconnaissance des compagnies et les sections d'éclaireurs sont envoyés sur le front pour acquérir le maximum de renseignements sur la zone à attaquer.Dans les tranchées de réserve derrière la ligne de front, les hommes attendent. Le capitaine Renison relève :Un tour dans les tranchées donne l'opportunité d'estimer l'état d'esprit des hommes. Ils sont tous radieux et confiants ; tandis que la soirée approche, tous pensent à leur foyer. Dans chaque tranchée-abri, les hommes sont en train d'écrire des lettres, et pour beaucoup d'entre eux c'est le dernier message. J'ai entendu un vieux sergent dire « Les gars, je donnerai beaucoup pour pouvoir lire les journaux de Toronto de samedi prochain. Je ne sais pas comment cette opération sera appelée, mais je suis sûr que ce sera un grand jour dans l'Histoire du Canada »Lorsque vint la nuit sous un ciel clair, les bataillons firent mouvement pour rejoindre leurs lieux de rassemblement avant l'attaque programmée à 4h20 le lendemain matin.

 

3 – Le plan de bataille

 

3.1 - L'artillerie

 

À l'heure H du déclenchement de l'attaque, l'artillerie alliée doit ouvrir le feu par un barrage roulant. Cette technique consiste à bombarder une ligne précise juste devant les troupes d'assaut afin de faire taire la défense de l'ennemi. Puis au bout d'un temps fixé à l'avance (quelques minutes), le rideau de feu et de fer se lève pour permettre aux troupes d'avancer par bonds. L'ordre D.228 (Cf. journal de marche du 18th Canadian Battalion, août 1918 (Bibliothèque & archives Canada) décrit en détail le barrage du 8 août pour l'attaque de Marcelcave : La chronologie du barrage roulant est la suivante : la ligne zéro est située à 200 yards [183 m] devant les tranchées de première ligne. Les deux premiers sauts du bombardement se feront à zéro plus 3 minutes puis à zéro plus 5 minutes. Les huit sauts suivants se feront à des intervalles de 300 yards [274 m]. Du onzième saut inclus jusqu'à l'objectif, les sauts de bombardement se feront toutes les 4 minutes et l'intervalle de distance sera de 100 yards [91 m]. La carte en page suivante(Carte extraite du journal de marche de la 4th Canadian Infantry Brigade, août 1918 (Bibliothèque & archives Canada) donne la chronologie du bombardement qui sera finalement réalisé. On constate qu'il s'arrête à l'entrée de Marcelcave. L'objectif de la première vague d'assaut (« la ligne verte ») est située à l'est du village.

 

3.2 - L'infanterie

 

Sous l'abri relatif de l'artillerie, l'infanterie appuyée par les blindés doit avancer en vue de capturer Marcelcave. La 4e brigade canadienne adopte un plan d'attaque avec trois bataillons à l'assaut (les n°18, 19 et 21) et un bataillon en réserve (le 20) qui les suit de près afin de pallier d'éventuelles difficultés. Chaque bataillon est composé de quatre compagnies et d'un quartier général. A l'image de la brigade, trois compagnies constituées de 120 à 160 hommes environ sont à l'attaque et la quatrième est en réserve. Le quartier général se déplace dans les heures qui suivent l'avancée du bataillon. La ligne de front dévolue à la 4e brigade canadienne est découpée en deux parties à peu près égale. Le front au nord-est tenu par le 19th Battalion, celui du sud par le 18th Battalion. Derrière se tiennent respectivement le 21st Battalion et le 20th Battalion, puis les unités de la deuxième vague d'assaut constituée par la 5e brigade d'infanterie canadienne. Celle-ci composée des bataillons n°22, 24, 25 et 26 a pour objectif Wiencourt-l'Équipée et Guillaucourt ; elle doit prendre la relève de l'assaut de la 4e brigade après l'atteinte de son objectif (« la ligne verte »). Ce principe du « saute-mouton » permet de ne pas épuiser les troupes en évitant de laisser en première ligne les mêmes unités pendant toute l'opération militaire. Le 19th Battalion commandé par le Lieutenant-colonel L.H Millen doit capturer la partie nord de Marcelcave tandis que la partie sud du village est confiée au 21st Battalion commandé par le Lieutenant-colonel E.W Jones. La ligne de responsabilité entre les deux bataillons est approximativement marquée par un trait horizontal passant par l'actuel carrefour entre les rues Saint-Marcel et Jean Lheureux. Le 18th Battalion, commandé par le Lieutenant-colonel L.E Jones, a pour objectif une zone située directement au sud du village où se trouve de l'artillerie allemande. Le 20th Battalion, en réserve, est sous les ordres du Lieutenant-colonel B.O Hooper. L'infanterie de la 4e brigade est soutenue, entre autres, par la 4e batterie canadienne de mortiers de tranchée, deux compagnies du 14th Tank Battalion, deux batteries du 2nd Battalion Canadian Machine Gun Company (unité de mitrailleuses).

 

Libération de Marcelcave

La

(Avec l'accord de l"Association Histoire de Marcelcave)
Plan de la bataille du 08081918
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